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EN COULISSE #3 : LA LÉGITIMITÉ


Je m'appelle Régina et je suis la fondatrice de Les Robeuses, un bureau du style au travers duquel nous proposons des services de conseil en image et de création de contenu digital dans le domaine de la mode et du lifestyle. Depuis 2 ans, j'ai également une casquette de styliste photo/ consultante mode auprès de marques, de magazines, de photographes, d'artistes et d'influenceurs.


Dans cette "série" que nous avons intitulé "En coulisse", je te partage mon expérience en tant que styliste/ consultante mode basée dans une capitale de la mode, Paris. Je suis autodidacte et ne suis dans le métier que depuis 2-3 ans, je n'ai donc pas la prétention d'être une référence, ni de tout savoir de ce métier, toutefois j'ai trouvé intéressant d'écrire sur mon expérience, pour moi et pour toi : mes hauts, mes bas, mes succès, mes déconvenues de ce métier dont on ne voit souvent que le côté glamour. J'y ajoute aussi mes réflexions, ma vision de la vie, en fait je me dévoile un peu.


Je ne vais pas vous mentir, mon été n'a pas été très funky ! Je suis passée par une énorme phase de remise en question, me demandant si je devais poursuivre le métier de styliste : premièrement parce que ma personnalité introvertie n'est pas forcément en phase avec un métier qui se fondent sur la force du réseautage, deuxièmement parce que je ne touche pas encore des milliers d'euros et enfin parce que le syndrome de l'imposteur a la vie dure et refait toujours surface quand on ne l'attend pas.


J'ai donc songé à retourner dans ma zone de confort : un métier de cheffe de projet, bien payé grâce auquel je retrouverai une certaine "stabilité". Mais la vie est très bien faite, et quand vous vous posez des questions, l'univers vous apporte des réponses par de nombreux signaux pour peu que vous soyez attentifs. Il peut s'agir d'une conversation, d'une sensation, d'une émotion, des paroles d'une chanson ou même des messages de votre corps. J'ai pris la décision de poursuivre, parce que c'est un métier dans lequel je m'épanouis, parce qu'il y a de beaux défis qui arrivent, parce que je crois en mes rêves et parce que je suis à ma place.


VA DE RETRO, LÉGITIMITÉ


J'ai fait du latin au collège, et j'adore me référer à l'étymologie des mots car on les remet dans leur contexte ce qui permet parfois de moins s'identifier à eux. (Par exemple, j'utilise de moins en moins le mot passion qui vient du latin passio signifiant souffrance). La légitimité, kézako ? Le mot légitime quant à lui vient du latin legitimus signifiant légal donc établi par la loi. Par conséquent, ne pas se sentir légitime dans quelque chose, signifie qu'il n'y a pas de loi nous "autorisant" à faire cette chose. Alors j'ai envie de dire, tant mieux !!! Heureusement qu'il n'y a pas de loi m'autorisant ou m'interdisant d'être une styliste talentueuse.


Alors pourquoi est-ce si difficile de se sentir à sa place ?


  1. En France, on est considéré (et on se considère) compétent à partir du moment où on a le diplôme adéquat. Beaucoup vous le diront, c'est différent chez les anglo-saxons où on privilégiera votre savoir-faire, votre savoir-être à la paperasse. D'ailleurs, j'ai commencé ma carrière en informatique en tant que développeuse dans un langage de programmation qui n'était plus enseigné et les profils comme le mien étaient recherchés. J'étais donc systématiquement contactée pour cette seule compétence. C'est lorsque je suis partie travailler au Canada, que des personnes ont vu mon potentiel, m'ont fait confiance et m'ont permis d'évoluer professionnellement. Cela veut-il dire qu'il faut que j'aille m'installer dans un pays anglo-saxon (ce qu'on me dit souvent) ? Non je ne pense pas, je suis plutôt pour faire évoluer les mentalités car qu'on le veuille ou non, le monde change bien plus rapidement qu'on veuille bien l'admettre.


  1. "La concurrence est rude" dit-on. Personnellement je ne pense pas que mon œil soit le même que l'œil d'un ou d'une autre styliste, nous sommes tous différents, "comparaison n'est pas raison". Toutefois, je n'ai pas envie de faire les choses juste parce que ça va me donner de la visibilité ou plus d'argent (je ne m'étendrais pas sur le sujet ici mais dans un prochain EN COULISSE, je ne suis pas née sous l'étoile du matérialisme). Et parfois je me pose la question, ne devrais-je pas être plus opportuniste ? La réponse, je la connais : non car ce serait contre ma nature. Déjà, je me sens submergée quand j'ai 2-3 projets en même temps. J'aime donner le meilleur de moi-même, faire les choses bien, donc je veux mettre tous mes neurones au service d'un seul projet de même nature à la fois. Ensuite je veux que mon travail ait du sens, pour moi et pour ceux qui l'expérimenteront. Et je suis pour attirer des projets et des personnes qui sont alignés avec moi, plutôt que de courir après ce qui n'est potentiellement pas pour moi. Je crois en mon succès, seulement il prendra le temps et la forme qui me correspond.


Note : Pour celles et ceux qui aiment l'astrologie, en fonction de son signe astrologique, on peut déterminer de quels maux on a le plus de chance de souffrir. Les Gémeaux sont des penseurs et on dit qu'ils ont de plus grands risques d'avoir des maladies liées au système nerveux, des douleurs aux épaules, aux bras, aux mains (Bien sûr ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas souffrir d'autres maux). Pour ma part, je suis migraineuse et je sais que je dois ménager mon cerveau du mieux que je peux.



Brocade Queen - Modèle : Orlane, Stylisme : Moi et Sonia Djaffar, Maquillage : Olivia Singa, Photographie : Moi


  1. Je le dis souvent, je suis une introvertie. On me rétorque "ah bon ?" parce que l'habit ne fait clairement pas le moine. Vous avez plus de chance de me trouver chez moi devant une série policière, une vidéo de physique quantique, un livre sur la psychologie ou un roman qu'à la soirée de l'année où se trouveront toutes les personnes en vue du moment, ou dans une émission de télévision qui pourrait "booster mon audience". J'ai eu du mal à l'accepter à l'adolescence. J'avais des copines qui passaient leurs week-ends à sortir me proposant de les accompagner, alors que je n'en avais pas envie. Le peu de fois où j'ai accepté de les suivre, je n'y ai pas forcément pris de plaisir ou je me suis retrouvée dans des situations cocasses (les signes). Mon bonheur était plutôt dans les romans d'Agatha Christie et dans les magazines de l'époque. Le monde de la mode est un monde d'extraversion, car on parle tout de même de mettre en valeur notre enveloppe extérieure. La première question que l'on vous posera quand vous direz que vous êtes styliste c'est : "Tu habilles qui ?" ou "Pour quelle publication ?" car être une styliste autoproclamée qui fait ce qu'elle aime parce qu'elle s'y épanouit, n'a pas grande valeur dans le monde matériel.


J'ai donc pris conscience que je devais aller au-delà de mes limitations, conscientes ou inconscientes. D'ailleurs je reste convaincue que les métiers artistiques ne nécessitent pas forcément un diplôme et qu'on apprend en réalisant, d'autant plus lorsqu'on est dans une démarche de "déconstruction". J'ai aussi compris que bâtir mon monde extérieur, à savoir développer mon réseau, parler de ce que je fais, prendre ma place peut se faire à mon rythme et à ma façon et pas au détriment de mon monde intérieur dans lequel je puiserai toujours mon énergie et mon inspiration.


CÉLÉBRER MES VICTOIRES


Ce n'est pas une tâche facile que de faire taire le syndrome de l'imposteur, cette "petite voix" dans notre tête qui nous fait minimiser nos accomplissements personnels, nous fait douter de nos compétences, nous fait craindre l'échec. Pour ne plus la subir, j'ai choisi d'être dans l'action, la manifestation et bien sûr la gratitude.


Je suis une modeuse depuis toujours ! J'ai partagé des photos de mon enfance, de mon adolescence ici et sur les réseaux sociaux, la mode fait partie de moi et c'est même inhérent à ma famille que je qualifie de sapeurs. D'aussi longtemps que je me souvienne, les vêtements ont eu une grande importance dans l'expression de ma personnalité. Très vite, j'ai affirmé mon style, au collège où je mixais les vêtements de ma grande sœur aux miens, au lycée où j'avais une petite addiction aux baskets aux designs originaux, en école d'ingénieurs où j'ai expérimenté ma première coupe courte et ai commencé à porter des chaussures à talon. D'ailleurs petite anecdote que j'ai sans doute déjà partagée... il y a quelques années je faisais des collages de looks sur Polyvore que je publiais sur un compte instagram @Neufacinq. Je l'avais complètement oublié et je l'ai supprimé il y a seulement quelques jours. Coudre mes propres vêtements a toujours été un de mes objectifs et j'ai fait plusieurs pièces de ma garde-robe, seulement je ne suis pas modéliste et je n'ai pas de patience pour les finitions. Par contre je suis une grande fan des émissions de design comme Project Runway et autres ! Bref tout ça pour dire que je ne suis pas tant une imposture que ça, j'ai un peu ça dans le sang finalement.


En 2017, complètement autodidacte, je lance ce blog et le concept que j'ai appelé le JMHCV - J'irai m'habiller chez vous. J'ai commencé par relooker mes sœurs, puis les amies de mes sœurs, puis les amies des amies de mes sœurs jusqu'à habiller des inconnues, amoureuses de l'univers des Robeuses. Le concept a eu un réel succès et j'ai eu envie d'en faire une sorte de show "télé", j'ai donc réalisé une version Youtube il y a quelques temps et j'en suis assez fière même si un épisode ne suffit pas à en faire une série. Je reviendrais.


J'ai habillé Presnel Kimpembe en 2021 pour sa communication personnelle autour du Black History Month. Il m'a fallu plusieurs semaines avant de communiquer sur le projet sur mes réseaux sociaux alors que j'adorais les photos et que j'étais fière du travail accompli. Il est vrai que d'une part, j'avais besoin que tout le stress lié à ce projet redescende (4 jours pour trouver une idée originale et les marques qui correspondent, les vêtements sont arrivés 1h avant le shooting photo). Et puis un jour, en parlant des Robeuses à une connaissance, il m'a dit "Il faut carrément que tu le mettes en avant sur toutes tes plateformes" surtout qu'en plus de cela j'avais fait une rapide apparition dans un portrait de notre champion du monde diffusé dans Zone interdite. Aujourd'hui sa photo fait la une de mon site internet et je n'hésite pas à en parler quand on me demande qui j'ai habillé. J'ai tendance à laisser facilement le passé derrière moi, mais parfois il est nécessaire de se le rappeler pour constater ses progrès et son évolution.


Je suis directrice mode de Naïfs Magazine et ça depuis le numéro 3 (nous sommes actuellement en train de préparer le numéro 5). Voilà seulement quelques semaines que j'ai affiché mon titre dans ma bio Instagram. C'est une "étiquette" dont je suis assez fière, premièrement parce que je continue de rayer des objectifs de ma liste, mais aussi parce que c'est une reconnaissance de mes pairs. Je crois fort en la puissance du verbe, mais l'écrit a quelque chose de plus fort qu'il s'inscrit dans la durée. Voir mon nom associé à un magazine que je trouve superbe et utile a pour moi une valeur inestimable.


Alors pourquoi ai-je mis autant de temps avant de mettre à jour mon profil ? Je pense que l'environnement dans lequel on grandit impacte fortement notre façon de prendre notre place. J'ai plusieurs théories liées à la place de l'enfant dans une fratrie, aux étoiles sous lesquelles nous sommes nés, ou encore au quartier dans lequel nous avons grandi mais si je développe ces points, cet article serait alors un essai de sociologie. Mais disons que je ne suis pas celle qui crie le plus fort (même si je ris fort, hahaha), je ne suis pas celle qui apprécie spécialement l'attention et enfin je ne suis pas celle que l'on impressionne facilement (par conséquent je ne pense pas impressionner qui que ce soit). Toutefois je suis persuadée que l'on peut changer le monde/les mentalités en étant pleinement soi-même. On me dit souvent que je "casse les codes" notamment par rapport à mon apparence. Je suis un signe d'air, ce qui explique ce désir profond de liberté et de faire les choses à ma manière alors si en étant moi je peux influencer d'autres personnes à être elle-même, j'aurai le sentiment d'avoir atteint une marche du podium.


PRENDRE MA PLACE


J'ai mis cette photo en couverture de l'article car elle a été prise en 2018, alors que j'entrais dans ma deuxième année de blogging. J'aimais déjà beaucoup porter des jupes ou des robes par-dessus mes pantalons. 5 ans après, cette tendance a fait des émules, les superpositions c'est cool dit-on aujourd'hui ! Je ne suis pas une pionnière des réseaux sociaux, j'ai pris le train en marche parce que je ne me reconnaissais jamais vraiment dans les contenus que je consommais. Je n'aime pas vraiment les étiquettes, je ne cherche pas à rentrer dans des cases ou à être prise pour une personne que je ne suis pas, en fait mon style a toujours été un mix de plusieurs influences. Mais s'il y a une étiquette que je veux bien m'attribuer c'est celle de "trend setteuse". De manière générale j'aime me démarquer, créer des silhouettes funky, colorées ou audacieuses. Bien sûr je trouve des inspirations partout autour de moi, j'essaie toutefois de les retravailler à la sauce Les Robeuses.


Photo prise par Thibaut Lafaye


Dernièrement Oroma Elewa, artiste visuelle d'origine nigériane, disait dans une de ses vidéos postées sur instagram qu'elle était une OG "original gangsta" de la création de contenus et qu'aujourd'hui elle se sentait un peu larguée (je résume un peu son propos mais la vidéo est dans ses reels). Je pense que je partage un peu son point de vue, pas uniquement parce que les réseaux sociaux ont pris un nouveau tournant, je crois que j'ai toujours été un peu larguée. Ma volonté première était avant tout de partager du contenu innovant avec des personnes qui aimaient la même chose que moi. J'ai sous-estimé le jeu, celui de prôner le consumérisme ou même comme on me l'a suggéré une fois de "jouer un rôle". Je ne juge pas les personnes qui sont à l'aise avec cela, je le répète sans cesse "nous ne sommes pas tous sur Terre avec les mêmes desseins". Toutefois appelez-moi Miss Authenticité dans le sens où je pourrais difficilement être autre chose que moi-même (même si en tant que Gémeaux, j'ai une personnalité pour chaque contexte, tout le monde n'a pas accès à tous les étages qui composent ma personnalité, hahaha) d'où ma rengaine "Soyez vous-même".


J'ai plusieurs fois vu mes idées reprises par des personnes avec plus de "visibilité" (ou plus opportunistes) parfois sans vraiment chercher à cacher leurs méfaits. C'est une sensation assez étrange de sentir qu'on vous a piqué une idée, la créativité est difficile à réclamer et à protéger tant elle est impalpable. Quand on vous vole un bien matériel, il y a de fortes chances pour que vous puissiez le remplacer à l'identique ou par un bien similaire, quand on vous vole une idée c'est comme si on vous volait un peu de votre essence, un peu de votre moi profond.


J'en suis arrivée à la conclusion que je devais continuer : continuer d'être moi-même, continuer de partager mes idées, continuer de laisser s'exprimer mon moi profond, continuer de prendre ma place car personne d'autre ne le fera pour moi.


Alors enchantée, Régina Singa, Robeuse nationale, styliste freelance et directrice mode de Naïfs Magazine !!


Les Robeuses

Bureau du Style


Couverture : Photo prise par Thibaut Lafaye

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